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Dans la maison-atelier de Bruno Dupire
Une brève chronique sur le travail d'un sculpteur
pré et post confinement


par Bahéra Oujlakh

 

 


Portrait de l’artiste au travail, 2017, coll. personnelle

 


  Bruno Dupire est un artiste plasticien basé à Valenciennes depuis de nombreuses années. Suite à une formation aux Beaux-Arts (1) de 1989 à 1992, il a poursuivi sa carrière de plasticien en indépendant. J’ai eu le loisir de découvrir son travail lors d’une performance à l’Espace Pasolini de Valenciennes en avril 2019. En effet, suite à une demande du laboratoire artistique, le plasticien a imaginé une structure cubique en bois contreplaqué et laqué démontable et remontable à souhait : les parties intérieures s’emboitent de manière tout à fait surprenante, comme un puzzle en volume (2), jouant un rôle clé dans le déroulement du Cosmopoème, performance de Nathalie Le Corre, Philippe Asselin et Behrang Beghayee. Voici ce que l’artiste déclare à ce propos :« c’est une première de réaliser un objet qui ne soit pas purement une sculpture, qui s’insère dans une discipline transversale on va dire aux arts-plastiques et en même temps c’est un point de mire : il est sur scène, il est manipulé, c’est une performance, c’est une sculpture, c’est un spectacle (3)… »

 


1 L’école des Beaux-Arts (dénommée à l’époque E.S.A.P) se situait dans les années 1980 près du Musée des Beaux-Arts à Valenciennes. Elle est devenue en 2011 un établissement public de coopération culturelle (EPCC), et son emplacement à également changé.
2 Figure 2
3 Texte tiré d’une série d’interviews de l’artiste par la créatrice visuelle Magalie Mobetie pour le site de l’Espace Pasolini. Disponible sur : https://www.espacepasolini.fr/le-cosmopoeme/

 

 

 

 

 

 


Figures 1 et 2


Latence unidirectionnelle, 2016, bois, acrylique et crayon, coll. de l'artiste
Cosmopoème, 2019, sculpture fractionnable, 39 morceaux, bois, laque noire, dimensions variables, coll. de l’artiste

 

 

 


  L’année suivante, au début du mois d’octobre 2020, j’ai pu visiter son atelier. Un lieu tout à fait atypique, sorte de maison hybride où se côtoient travaux d’aménagements inachevés, baies vitrées avec vue sur un jardin en friche et, dans les étages, tout un passif de créations conservées en l’état. L’artiste m’explique qu'au départ son attrait pour l’art découle d’une passion pour l’Égypte ancienne. Adolescent, il pratique le volume en copiant des objets typiques de cette civilisation : sarcophages, trônes, lits funéraires, maquettes de bateaux, etc. Ces copies sont – pour certaines – toujours conservées au grenier de sa maison-atelier. Nous ne pouvons nous empêcher de voir dans l’organisation de cette maison une sorte de métaphore de la progression de sa maturité artistique. Ainsi, on peut suggérer que le grenier correspond à une allégorie de son propre parcours de plasticien : à cet endroit sont entassés les souvenirs, et, au rez-de-chaussée sont contenues, dans un espace plus vaste et bien plus lumineux, ses dernières créations. Bruno Dupire décrit sa propre pratique comme « minimaliste ». Sa formation artistique, ainsi que sa propre culture de l’art contemporain, l'ont poussé à délaisser sa passion pour Toutankhamon, afin de s’orienter vers des productions beaucoup plus épurées et conceptuelles. Si l’artiste travaille fréquemment le bois, sa pratique s'est pourtant ouverte à d’autres techniques. Ainsi, la résine, la terre et le béton viennent fréquemment compléter ses oeuvres en trois dimensions.


  Le plasticien a donc recours à des matériaux bruts et sa pratique consiste globalement à user d’assemblages, de décompositions et de recompositions – afin d’interroger la manière dont l’individu se situe par rapport à un tout, à un ensemble. Notre approche quotidienne à l’espace et notamment aux limites et aux frontières est aussi très présente. Mais c’est bien le groupe et ses interactions humaines qui semblent au coeur de ses préoccupations – raison pour laquelle la première oeuvre que le plasticien me présente s’intitule Memory of the interspace (4) (2016-2018).

4 Figure 3


  Cette oeuvre se compose de 40 bâtons de hêtre de 2 mètres de hauteur environ, dont un des bâtons (que l’artiste appelle sticks) est peint à l’encre rouge. La création, dans sa forme, est une installation sonore, mais aussi une performance mouvante selon la manière dont les bâtons de bois retombent sur le sol (sorte de « mikado géant », selon les propres termes du plasticien). Il s'agit pour ce dernier d'une sorte de métaphore des interactions humaines où le hasard des rencontres et le rapport au groupe social constituent une expérience sans cesse renouvelée et incontrôlable. Cette oeuvre s’inscrit en outre dans le cadre d’un travail sériel intitulé Les incarnations.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figures 3 et 4


Memory of the interspace, 2016-2018, oeuvre hybride et installation sonore,
Photographie et dessin préparatoire,
coll. de l’artiste

 

 

 


  Bien que le plasticien me présente son travail d’une manière assez chronologique et structurée, je ne peux m’empêcher d’être d’emblée attirée par sa dernière oeuvre, intitulée Thirteen sequencings. Il s’agit d’une série de portraits incomplets en plâtre – moulée d’après son propre visage – et réalisée fin septembre. L’artiste m’explique que la crise sanitaire mondiale que nous traversons tous le questionne énormément (le contrôle imposé, la surveillance généralisée, une certaine forme de dérive du pouvoir) et que, de fait, il connaît paradoxalement une période très productive. Ces portraits inachevés sont à mon sens extrêmement troublants (5) : ils semblent nous chuchoter des secrets face aux épreuves qui agitent de nos jours la société. L’actualité semble ainsi pousser l’artiste dans une forme d’urgence de créer, de se renouveler et d’attirer notre attention sur ce qui fait aujourd’hui notre paysage quotidien (masques, distanciation sociale, etc.).

 


5 Figures 5, 6 et 7

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figures 5, 6 et 7


Thirteen sequencings, moulages en plâtre répétés, 2020, fer, bois, coll. de l’artiste

 

 

 

 


  Ainsi, je constate que le plasticien s’éloigne brièvement du conceptuel et du minimalisme pour s’orienter ici vers une pratique figurative. Pratique qui s’incarne également avec l’oeuvre One meter of physical distance #2, où le spectateur découvre une étrange sculpture comportant deux moitiés de visages mis physiquement à distance l’un de l’autre. Nous en déduisons, lors de notre discussion, que c’est possiblement le manque de visages, l’absence de faciès qui pousse aujourd’hui le sculpteur à réorienter sa pratique vers de nouveaux horizons où l’humain serait re figuré. Une manière – imaginons – de recréer du lien là où les multiples crises divisent les individus et bouleversent les existences. À l’heure où j’achève ce texte, nous vivons notre second confinement d’hiver. Je n’ai donc pas eu l’occasion de retourner voir les créations en cours – ou achevées – de l’artiste. Il me faudra ainsi attendre quelques temps pour pouvoir suivre l’avancée du travail du plasticien et aller un peu plus loin dans l’analyse des pièces – et dans la compréhension de l’évolution d’une oeuvre qui ne cesse de se métamorphoser.


Crédits photographiques : Bruno Dupire

 

 



Bahéra Oujlakh,

docteur.e et enseignante en pratique, esthétique et théorie des arts

https://www.researchgate.net/profile/Bahera_Oujlakh
 

 

Publicado por

Aline Pascholati

Aline Pascholati é artista visual, ilustradora, escritora e historiadora da arte pela Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne. Viciada em aprender idiomas, de preferência os sem declinações. Ver todos os artigos de Aline Pascholati

2 de janeiro de 2018

 

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Bruno Dupire, Negative Body #1 (Corpo Negativo #1), concreto, prego e madeira, 80 x 108 x 15 cm, 2017.

  A escultura Negative Body #1 faz parte da série Negative Bodies (Corpos Negativos), que questiona a pressão social pela busca do corpo perfeito, do culturalmente valorizado e aceito, presente em todas as diferentes épocas e sociedades, cada uma à sua maneira.

Na obra em questão, temos duas placas de concreto com pregos, emolduradas por pedaços de madeira. Apesar de existirem pregos em maior ou menor abundância na escultura toda, é curiosa a grande quantidade sobre um dos seios, lembrando assim a moda do silicone para aumenta-los. A discussão sobre padrões físicos impostos pela sociedade contemporânea engloba, é claro, além das cirurgias plásticas e outros tratamentos estéticos mais ou menos invasivos, a rotina das dietas e exercícios. Esse todo funciona tal qual um molde de concreto forçando e espremendo o corpo – mas também a mente – para que alcance a forma preterida pela sociedade. Assim, o artista visa discutir o impacto psicológico e mental causado pela pressão pelo corpo escultural – a palavra escultural cabe perfeitamente na discussão proposta pela obra – e o quanto o indivíduo aceita ou rejeita essa imposição sociocultural.

A obra também propõe a interdisciplinaridade entre diversas técnicas artísticas, prática presente em várias séries do artista, que questiona as fronteiras, tanto artística quanto psicológicas. Questiona-se a própria imagem da perfeição da escultura, já que aqui temos um molde, uma de suas etapas de criação e construção, como a própria escultura terminada.

Negative Bodies está relacionada à outra série do artista, Incarnations (Encarnações), que trata das emoções humanas e do desequilíbrio, traduzido plasticamente através da interdisciplinaridade técnica e experimentação.

Fonte:

Entrevista com o artista Bruno Dupire.

Fonte das imagens:

Acervo do artista.

https://artrianon.com/2018/01/02/obra-de-arte-da-semana-negative-body-1-de-bruno-dupire/

 

 

 

 

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